Homélie – 30 mars 2019 – 4ème dimanche Carême (C)

Homélie et Lectures de la Messe

      homelie190330_4emeDimCarêmeC

Homélie enregistrée lors de la messe anticipée le samedi 30 mars à Saint-Pierre.

Homélie (version texte):

On évoque souvent cet Evangile en parlant du « fils prodigue » ou de « l’enfant prodigue ». Même si cela m’arrive aussi, ce n’est quand même pas si heureux !
Car parler du fils prodigue met celui-ci au centre, alors qu’il n’est que l’un des personnages de la parabole. Or quand Jésus choisit cette parabole , il a devant lui deux groupes : « les publicains et les pécheurs » qui sont venus pour écouter Jésus ; et puis « les scribes et les pharisiens » qui récriminent, qui protestent de ce que Jésus fasse bon accueil à ceux qui mènent une vie pas très fidèle à la Loi.

Et ainsi, les publicains et les pécheurs à qui Jésus fait bon accueil vont pouvoir se reconnaître dans le fils cadet qui quitte la maison pour mener une vie de désordre avant de revenir vers son père. Tandis que les scribes et les pharisiens sont amenés à se reconnaître dans le fils aîné, qui ne comprend pas l’attitude du père vis-à-vis du cadet, qui fait des reproches au père, et refuse de prendre part à la fête.

N’oublions donc pas ce fils aîné, car à la fin de la parabole, il reste le seul à rester exclu de la fête, de la joie à laquelle nous invite ce 4e dimanche de carême, exclus de la réconciliation.
Je ne dirai rien de plus aujourd’hui sur les deux fils car je voudrais concentrer nos regards sur celui qui est au centre de la parabole, bien qu’il n’apparaisse qu’au début et à la fin : le père, cet « homme qui avait deux fils » comme le présente Jésus.

Car l’attitude de Jésus qui fait bon accueil aux pécheurs s’inspire de celle de son Père. Ainsi nous allons trouver dans la parabole quelques clés pour comprendre ce qu’est la miséricorde de Dieu :

La parabole exprime l’étonnante liberté donnée aux fils : le Père ne retient pas celui qui veut partir, assumant le risque que ce fils se perde, dilapide ce qui lui a été donné.
La parabole nous fait aussi abandonner l’image d’un Dieu comptable. Les fils réclament un dû : « donne-moi la part de fortune qui me revient » dit le cadet ; « jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer » reproche le cadet. Le Père donne : « Et le père leur partagea ses biens »… (ce qui laisse entendre que le fils aîné reçoit aussi sa part… ce qu’il semble avoir oublié quand il reproche à son père de ne rien lui avoir donné !).. Le Père ira même plus loin : « Tout ce qui est à moi est à toi » dira-t-il à l’aîné.

Voilà qui invite à réfléchir à la demande du fils cadet: «donne-moi la part d’héritage qui me revient ». Il ne pense l’héritage qu’en termes de biens matériels. Il se situe moins en fils qu’en comptable. Quand il revient ruiné, il n’imagine pas se présenter comme fils mais comme ouvrier : « je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ». Sauf que le Père ne calcule pas, n’évalue pas au mérite! Il aime ! Là se trouve le véritable héritage : l’amour du Père. Ce qui a du prix aux yeux du Père, ce sont ses fils, et ce qu’il leur lègue, ce sont moins ses biens que sa tendresse de Père, qui se heurte dans un premier temps à l’ingratitude des fils : le cadet qui part et n’en fait qu’à sa tête. L’aîné qui jalouse son frère qui revient.

En disant à l’aîné : « tout ce qui est à moi est à toi », le Père nous invite à considérer le vrai héritage, celui que nous avons déjà reçu : notre vie même. J’ai toujours été perplexe en entendant l’expression : « je me suis fait tout seul ». C’est faux, c’est injuste, c’est ingrat. Car dès notre naissance, nous héritons d’autres que nous : nous héritons de la vie, d’une éducation, de liens affectifs, d’une culture, d’un terreau spirituel, etc.

Le fils cadet prendra seulement conscience de son véritable héritage à son retour, retour attendu par le Père qui guette : « Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de compassion; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers. ». L’aîné ne comprendra pas cette attitude, et les reproches qu’il adresse à son père lui valent cette réponse: « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi » Après s’être réjoui du retour du cadet : «mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé », le Père cherche à faire partager cette joie à son aîné : « Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.

La parabole peut alors susciter en nous une attitude de reconnaissance. C’est l’attitude filiale par excellence, C’est l’attitude d’action de grâce et de louange de Jésus . Ce qui fait la joie du Père c’est la reconnaissance de sa bienveillance, de l’abondance de biens qu’il veut pour ses fils.

Le pape François, commentant cette parabole, disait : « A travers sa parole, ses gestes, et toute sa personne, Jésus de Nazareth révèle la miséricorde de Dieu… Nous avons toujours besoin de contempler le mystère de la miséricorde. Elle est source de joie, de sérénité et de paix. »

En mangeant à la table des pécheurs, au milieu de ceux qui sont jugés « indignes de Dieu », Jésus nous renvoie à cette attitude de Dieu : à celui qui dit : « je ne suis plus digne d’être appelé ton fils », Dieu répond : « mon fils était mort, il est revenu à la vie » et invite à la fête.

D’où l’invitation qui est faite à chacun de recevoir pour lui-même cette miséricorde de Dieu, comme nous y invite Sainte Catherine de Sienne : « Ouvre donc, mon fils aimé, les yeux de l’intelligence, sors des ténèbres, reconnais tes fautes, non pas pour tomber dans le désespoir, mais pour te connaître et avoir confiance dans la bonté de Dieu.»

 

LECTURES DE LA MESSE

PREMIÈRE LECTURE

L’arrivée du peuple de Dieu en Terre Promise et la célébration de la Pâque (Jos 5, 9a.10-12)

Lecture du livre de Josué

En ces jours-là,
le Seigneur dit à Josué :
« Aujourd’hui, j’ai enlevé de vous le déshonneur de l’Égypte. » 
Les fils d’Israël campèrent à Guilgal
et célébrèrent la Pâque le quatorzième jour du mois,
vers le soir, dans la plaine de Jéricho.
    Le lendemain de la Pâque,
en ce jour même,
ils mangèrent les produits de cette terre :
des pains sans levain et des épis grillés.
    À partir de ce jour, la manne cessa de tomber,
puisqu’ils mangeaient des produits de la terre.
Il n’y avait plus de manne pour les fils d’Israël,
qui mangèrent cette année-là
ce qu’ils récoltèrent sur la terre de Canaan.

PSAUME

(Ps 33 (34), 2-3, 4-5, 6-7)

R/ Goûtez et voyez
comme est bon le Seigneur !
(cf. Ps 33, 9a)

Je bénirai le Seigneur en tout temps,
sa louange sans cesse à mes lèvres.
Je me glorifierai dans le Seigneur :
que les pauvres m’entendent et soient en fête !

Magnifiez avec moi le Seigneur,
exaltons tous ensemble son nom.
Je cherche le Seigneur, il me répond :
de toutes mes frayeurs, il me délivre.

Qui regarde vers lui resplendira,
sans ombre ni trouble au visage.
Un pauvre crie ; le Seigneur entend :
il le sauve de toutes ses angoisses.

DEUXIÈME LECTURE

« Dieu nous a réconciliés avec lui par le Christ » (2 Co 5, 17-21)

Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens

Frères,
    si quelqu’un est dans le Christ,
il est une créature nouvelle.
Le monde ancien s’en est allé,
un monde nouveau est déjà né.
    Tout cela vient de Dieu :
il nous a réconciliés avec lui par le Christ,
et il nous a donné le ministère de la réconciliation.
    Car c’est bien Dieu
qui, dans le Christ, réconciliait le monde avec lui :
il n’a pas tenu compte des fautes,
et il a déposé en nous la parole de la réconciliation.
    Nous sommes donc les ambassadeurs du Christ,
et par nous c’est Dieu lui-même qui lance un appel :
nous le demandons au nom du Christ,
laissez-vous réconcilier avec Dieu.
    Celui qui n’a pas connu le péché,
Dieu l’a pour nous identifié au péché,
afin qu’en lui nous devenions justes
de la justice même de Dieu.

ÉVANGILE

« Ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie » (Lc 15, 1-3.11-32)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

En ce temps-là,
    les publicains et les pécheurs
venaient tous à Jésus pour l’écouter.
    Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui :
« Cet homme fait bon accueil aux pécheurs,
et il mange avec eux ! »
    Alors Jésus leur dit cette parabole :
    « Un homme avait deux fils.
    Le plus jeune dit à son père :
‘Père, donne-moi la part de fortune qui me revient.’
Et le père leur partagea ses biens.
    Peu de jours après,
le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait,     
et partit pour un pays lointain
où il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre.
    Il avait tout dépensé,
quand une grande famine survint dans ce pays,
et il commença à se trouver dans le besoin.
    Il alla s’engager auprès d’un habitant de ce pays,
qui l’envoya dans ses champs garder les porcs.
    Il aurait bien voulu se remplir le ventre
avec les gousses que mangeaient les porcs,
mais personne ne lui donnait rien.
    Alors il rentra en lui-même et se dit :
‘Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance,
et moi, ici, je meurs de faim !
    Je me lèverai, j’irai vers mon père,
et je lui dirai :
Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.
    Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.
Traite-moi comme l’un de tes ouvriers.’
    Il se leva et s’en alla vers son père.
Comme il était encore loin,
son père l’aperçut et fut saisi de compassion ;
il courut se jeter à son cou
et le couvrit de baisers.
    Le fils lui dit :
‘Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.
Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.’
    Mais le père dit à ses serviteurs :
‘Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller,
mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds,
    allez chercher le veau gras, tuez-le,
mangeons et festoyons,
    car mon fils que voilà était mort,
et il est revenu à la vie ;
il était perdu,
et il est retrouvé.’
Et ils commencèrent à festoyer.

    Or le fils aîné était aux champs.
Quand il revint et fut près de la maison,
il entendit la musique et les danses.
    Appelant un des serviteurs,
il s’informa de ce qui se passait.
    Celui-ci répondit :
‘Ton frère est arrivé,
et ton père a tué le veau gras,
parce qu’il a retrouvé ton frère en bonne santé.’
    Alors le fils aîné se mit en colère,
et il refusait d’entrer.
Son père sortit le supplier.
    Mais il répliqua à son père :
‘Il y a tant d’années que je suis à ton service
sans avoir jamais transgressé tes ordres,
et jamais tu ne m’as donné un chevreau
pour festoyer avec mes amis.
    Mais, quand ton fils que voilà est revenu
après avoir dévoré ton bien avec des prostituées,
tu as fait tuer pour lui le veau gras !’
    Le père répondit :
‘Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi,
et tout ce qui est à moi est à toi.
    Il fallait festoyer et se réjouir ;
car ton frère que voilà était mort,
et il est revenu à la vie ;
il était perdu,
et il est retrouvé ! »

Les commentaires sont fermés.